Devons-nous repenser la façon d’informer nos patients?

 Donner des informations de qualité à nos patients est essentiel, pour qu’ils comprennent leurs maladies, leurs traitements mais aussi qu’ils puissent eux-mêmes s’impliquer dans la prise en charge de leur santé. Pour la plupart des médecins, cela se limite aux informations transmises lors de la consultation, est-ce suffisant ?

Les patients ne comprennent pas tout…

Même si la plupart d’entre nous sont convaincus que leurs patients comprennent clairement tout ce qui leur est transmis, la réalité est certainement plus nuancée. Une étude publiée en 20101 montre en tout cas des chiffres inquiétants : entre 40 et 80% de l’information délivrée par le personnel médical est immédiatement oubliée par les patients, et près de la moitié de l’information retenue est incorrecte.

Les raisons principales sont :

  1. La terminologie médicale employée.
  2. Le mode de délivrance de l’information (oral et non écrit).
  3. Le niveau d’éducation des patients ou leurs attentes spécifiques.

La conséquence est que de l’information cruciale est instantanément perdue au moment du transfert clinicien-patient, ce qui a des conséquences lourdes sur la capacité du patient à prendre en charge sa santé.

Pour ce qui est de la terminologie utilisée, nous faisons tous des efforts pour adapter notre langage aux patients, cela reste cependant un exercice difficile. Pour ce qui est du mode de délivrance de l’information, le mode oral utilisé durant la consultation a l’immense avantage de permettre une interaction, en tout cas avec les patients qui osent poser des questions. Il a le défaut de ne laisser aucune trace, le patient ne pourra donc pas y avoir accès une fois qu’il vous aura quitté.

Prescrire des vidéos ?

Un collègue français a lui décidé d’aller plus loin. Lauréat de l’Académie de médecine, il se présente comme « médecin le jour, vulgarisateur la nuit ». Sa particularité ? Il créé des vidéos d’informations : chalazion, vasectomie, cancer de prostate et PSA, les sujets sont nombreux et variés. Il prescrit même ses vidéos à ses patients sur ses ordonnances, à l’aide d’un QR code.

Image. Le QR-code de la vidéo consacrée à l’ostéoporose.

L’écrit

Même si une vidéo est certainement un moyen très efficace pour transmettre des informations à nos patients, la difficulté est certainement de créer des vidéos pour l’ensemble des sujets dont nous parlons fréquemment à nos patients. Dans ce sens, il y a un moyen de communication qui est certainement sous-utilisé par le monde médical, c’est simplement l’écrit.

Si le problème de santé dont souffre notre patient implique qu’il doit intégrer de nombreuses informations, le support idéal est certainement le livre. On peut penser à des sujets comme les insomnies, le mal de dos ou la dépression, autant de situations où la prise en charge nécessite un patient impliqué, donc informé. A titre d’exemple, on peut penser à la collection « J’ai envie de comprendre… »de l’éditeur Médecine & Hygiène.

Il faut cependant reconnaître que pour la majorité des situations médicales, l’information à transmettre peut tenir sur une ou deux pages A4.

Des fiches patients ?

Il est possible que cela existe, mais en tout cas je ne connais pas leur existence. Je suis surpris que nous n’ayons pas pour tous les sujets dont nous parlons quotidiennement avec nos patients, des informations écrites à leur donner, sous une forme courte et vulgarisée.

La meilleure information serait probablement celle transmise durant la consultation mais également présentée sur un document papier que le patient recevrait avant de quitter le cabinet : le lumbago (non ce n’est pas une hernie discale, oui il faut se mobiliser), les infections virales des voies aériennes supérieures (les antibiotiques sont inutiles), les troubles du sommeil, l’hypercholestérolémie, l’hypertension, l’anxiété, l’excès de poids, etc. 

Devons-nous repenser la façon d’informer nos patients ? Si oui, l’écrit est certainement une voie intéressante, actuellement sous-utilisée. 

Jean Gabriel Jeannot, le 11.11.2023

  1. Ulmer PA, Robishawa S. Providing health information at the inpatient’s point of medical need. J Consum Health Internet 2010;14.