Pourquoi n’arrivez-vous pas à recruter d’assistante médicale?
Les assistantes médicales, essentielles au bon fonctionnement des cabinets médicaux, se font de plus en plus rares. Qu’est-ce qui explique ce manque d’intérêt pour ce métier pourtant indispensable ? Pour mieux comprendre les causes de cette désaffection, nous avons interrogé Marie-Paule Fauchère, présidente de l’Association Romande des Assistantes Médicales (ARAM).
Le manque de place d’apprentissage
L’accès à la formation d’assistante médicale est limité par le nombre de places de formation au sein des cabinets. Il faudrait plus de cabinets formateurs. Seule condition pour le faire, l’apprentie doit être supervisée par une assistante médicale qui a au minimum deux ans d’expérience et qui a terminé la formation nécessaire pour devenir formatrice.
Des salaires jugés insuffisants
Le niveau de rémunération des assistantes médicales est jugé insuffisant par rapport aux responsabilités. Ces salaires incitent certaines assistantes médicales en formation à envisager ce métier comme une étape transitoire. Beaucoup continuent vers les études supérieures afin de se former à d’autres carrières de la santé, mieux rémunérées, comme infirmière ou technicienne en radiologie.
Augmenter les salaires des assistantes médicales rendrait cette carrière plus attrayante, particulièrement pour ceux qui envisagent ce métier à long terme. En offrant une rémunération plus compétitive, la profession gagnerait en stabilité et en attractivité. Une problématique prise en compte par la RAM qui, chaque année, cherche à négocier les salaires avec les sociétés cantonales de médecines.
Une formation délaissée par les hommes
Autre raison de la pénurie actuelle, les homme qui suivent cette formation ne sont que 2 – 3 par année. Cette profession reste largement dominée par les femmes. Ce constat peut sans doute être en partie expliqué par des stéréotypes de genre tenaces. Les rôles d’assistance ont tendance à être associés à des emplois dits “féminins,” les femmes étant perçues comme naturellement plus enclines à prendre soin d’autrui.
Lutter contre les stéréotypes de genre dans la formation médicale pourrait contribuer à élargir le bassin de candidats potentiels. Une sensibilisation active auprès des jeunes hommes dès le secondaire permettrait de rendre cette formation plus accessible et d’équilibrer la représentation des genres dans cette profession.
Image. Nos assistantes ont mille talents.
La solution, valoriser la profession ?
Depuis peu, les assistantes médicales avec au moins 3 ans d’expérience peuvent suivre des cours afin d’obtenir un brevet fédéral de coordinatrice en médecine ambulatoire (CMA), et ainsi pouvoir prétendre à une meilleure rémunération. L’objectif principal, derrière la mise en place du brevet fédéral d’assistante médicale, était de stabiliser la profession en offrant des perspectives de carrière plus attrayantes. Cependant, les résultats se font encore attendre.
Bien que ce brevet offre une reconnaissance supplémentaire et une formation plus poussée, les brevetées peinent parfois à trouver des emplois, surtout en Suisse romande. En effet, leurs salaires, plus élevés que ceux des assistantes sans brevet, peuvent dissuader certains cabinets médicaux de les recruter.
On retrouve d’ailleurs cette faible valorisation des assistantes médicales jusque dans le Tarmed, il n’existe aucune position qui rétribue directement leur travail.
La pénurie d’assistantes médicales est un problème complexe, alimenté par des facteurs structurels et économiques. Les solutions existent, mais elles nécessitent des actions concertées entre les institutions de formation, les employeurs et les décideurs publics pour valoriser et stabiliser cette profession. En offrant des perspectives d’emploi plus attractives, des conditions de formation améliorées et des salaires ajustés, le secteur de la santé pourrait réussir à attirer et à retenir les talents indispensables pour garantir des soins de qualité et l’efficience des cabinets médicaux.
Jean Gabriel Jeannot, le 16.11.2024
Merci pour votre article qui reflète de manière pertinente la situation actuelle des assistantes médicales. J’exerce cette profession depuis 44 ans ! Actuellement employée dans un hôpital je fais le même travail que mes collègues infirmières, mêmes responsabilités et compétences mais avec un salaire de 3 classes inférieures à celles de mes collègues! Le CHUV n’a aucune intention de faire évoluer cette profession!
Les coordinatrices en médecine ambulatoire qui travaillent au CHUV ne sont pas plus rémunérées que les assistantes médicales n’ayant pas fait le brevet ! C’est vraiment scandaleux et, à terme plus aucune assistante ou CMA ne voudra travailler dans ces conditions.
Merci pour votre commentaire. Si l’on imagine les tâches qu’assument la grande majorité des assistantes médicales, je pense qu’il y a un manque de reconnaissance de leur travail. A responsabilités égales, d’autres professions sont mieux reconnues. Si l’on pense uniquement aux réponses que les AM donnent aux patients, au tri qu’elles effectuent, c’est une activité avec de grandes responsabilités, insuffisamment reconnues.
Je voulais ajouter que l’instauration d’un droit de pratique comme c’est le cas dans le canton de Genève protègerait sans doute la profession dans les autres cantons et éviterait que les cabinets recrutent du personnel non qualifié ou en tous les cas n’ayant pas la formation et les compétences des assistantes médicales diplômées .
Que fait l’ARAM ?
Merci pour cet article. En effet, je pense qu’un point essentiel est la revalorisation par le salaire, compte tenu de la charge de travail et des responsabilités des assistantes médicales. Malheureusement, en tant que médecin de premier recours installé à Genève, avec le point Tarmed bloqué depuis plus de 10 ans et même baissé cette année, alors que les charges ne cessent d’augmenter chaque année (y compris l’adaptation du salaire des assistantes), il nous est tout simplement impossible d’augmenter le salaire de nos assistantes, alors que nous le souhaiterions.
Je suis déçue de l’absence d’une réaction forte, politique, de nos associations, face à ce problème.